Afrique du sud : que reste-t-il des rêves de la nation arc-en-ciel ?

La Pause géopolitique - Un podcast de Anne Battistoni - Les jeudis

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Fin décembre, Jacob Zuma, président de l’Afrique du Sud entre 2009 et 2018, qui dut quitter le pouvoir après des accusations de corruption, a annoncé qu’il ne soutiendrait pas l’ANC aux élections de 2024, affichant clairement son opposition au président Cyril Ramaphosa . Zuma, 81 ans, annonça dans la foulée la création d’un nouveau parti politique, il accuse le président d’être un traître à la cause de l’ANC et d’être vendu « aux intérêts capitalistes blancs ». Cette initiative inquiète, car Jacob Zuma conserve ses supporters notamment dans sa province du KwaZulu-Natal, cherche à récupérer les déçus du gouvernement, manie facilement l’insulte (il a qualifié le gouvernement actuel de gouvernement « de collaborateurs de l’apartheid » ). Personne n’a oublié que les pires troubles de l’Afrique du Sud depuis 30 ans ont eu lieu en 2021, après l’emprisonnement pour outrage au tribunal de Zuma : les violences firent 350 morts et plus d’un milliard d’euros de dégâts. Tout cela laisse augurer une année difficile et tendue jusqu’aux élections qui doivent se tenir entre mai et août. Et il est vrai que la situation sociale difficile - le chômage touche 32 % de la population active - donne des arguments aux opposants. «Nous allons poursuivre notre lutte contre la criminalité et la corruption pour renouveler notre pays qui reste le plus inégalitaire au monde » a promis Cyril Ramaphosa dans un meeting en janvier. Les électeurs lui en laisseront-ils la possibilité ? Étudier l’Afrique du Sud aujourd’hui, c’est se demander ce que sont devenues les promesses de la Nation arc en ciel ? Et d’abord , parler d’une Nation Sud-africaine a-t-il un sens aujourd’hui ? En 1999, le successeur de Mandela, Thabo Mbeki affirmait dans son discours d’investiture : « le XXIe siècle sera africain » . Il portait au nom de son peuple le rêve d’une Renaissance africaine. Dans cette idée d’une renaissance africaine, il y avait l’espoir d’un renouveau du continent en termes de démocratisation ainsi que de développement économique et culturel. En même temps, ce concept permettait à l’Afrique du Sud et son nouveau dirigeant de se projeter sur la scène internationale, d’affirmer son africanité et de répondre à ceux qui estimaient que le gouvernement avait fait trop de concessions à la minorité blanche. Cette promesse de Renaissance africaine était l’espoir d’une dynamique propre à l’Afrique, impulsée par elle à l’heure de la fin de la guerre froide, dans un contexte favorable car les cours des matières premières étaient orientés à la hausse du fait de la forte demande chinoise. Thabo Mbeki, se devait après Mandela d’imprimer sa marque, il choisissait de refuser l’afro-pessimisme, affirmait la volonté de l’Afrique de tenir toute sa place dans la mondialisation. L’Afrique du Sud, mise au ban des nations africaines pendant l’apartheid et qui n’avait rejoint l’Organisation de l’Unité Africaine qu’en 1994, pouvait, du fait de son rang – elle était alors première puissance économique du continent-, prétendre à un leadership.