#89 Mikaël Saint Pierre · Le Centre d'écologie urbaine de Montréal

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Quand un projet pointe son nez dans la ville, c’est la course à l’immobilisme. Dans les oppositions qui émergent, difficile de faire la part entre le rejet de l’autre, la légitime peur du changement et la nécessaire protection des sols, quand toutes se réfugient derrière le même arbre qu’il faut épargner. Le processus de densification de la ville dense a commis suffisamment d’erreurs pour être réformé en profondeur, mais il ne peut ni s’imposer comme une nécessité, ni être balayé d’un revers de manche. C’est de vrais débats locaux dont nous avons besoin pour faire, mais autrement. Mais comment ?

Le détour par Montréal est toujours plein d’enseignements. C’est l’occasion par exemple de croiser le Centre d’écologie urbaine de Montréal. C’est un organisme communautaire hybride, né dans l’opposition à un projet emblématique de tabula rasa : Milton Parc (une histoire que je raconte dans Redirection urbaine #Teasing). Il travaille pour le compte de collectivités locales sur des missions, mène des projets de recherche, mais s’engage aussi auprès de collectifs qui s’opposent à des projets urbains avec un parti pris clair : développer le pouvoir d’agir des individus, pour que la décision en urbanisme ne se fasse pas que dans les bureaux d’élus ou de techniciens.

Le Centre d’écologie urbaine de Montréal est aujourd’hui sollicité par des résidents désabusés par les modes de densification de la ville, avec une vague de NIMBY (Not in my backyard - Pas dans mon jardin) qui se développe dans les banlieues résidentielles du Québec qui commencent à se transformer. Il choisit bien entendu les causes qu’il entend défendre, et ne s’engage pas aux côtés de tous les opposants. Mais les processus de densification mal engagés sont nombreux, et seul le passage de l’opposition à une pratique contributive peut permettre de sortir de la guerre de position. Le Centre d’écologie urbaine de Montréal s’insère alors comme tiers de confiance dans les débats, en agissant sur plusieurs leviers : mobilisation et montée en compétence des groupes de résidents, pédagogie de la densité, conception participative et médiation avec les autorités.

Au moment où les oppositions se cristallisent et bloquent le mouvement, alors que les chantiers de l’adaptation de nos villes doivent au contraire s’accélérer, cette piste du tiers de confiance capable de se glisser entre les parties pour sortir des blocages par le haut est une piste à suivre. Et si des organisations légitimées (et financées) par les autorités se positionnaient aux côtés des oppositions ? Elles pourraient leur permettre de pleinement s’approprier les enjeux, d’avoir une voix audible dans le processus, et même de proposer des projets alternatifs. Elles pourraient aussi donner les clés aux habitants pour faire à leur échelle. Car un pan entier de la nécessaire métamorphose de la ville ne pourra être fait par les pouvoirs publics ou les opérateurs traditionnels de sa fabrique. Les habitants doivent faire, dans leur rue, leur immeuble, leur maison, mais ils ne pourront pas faire seuls.


Je suis Sylvain Grisot, urbaniste fondateur de dixit.net, et j’échange aujourd’hui avec Mickaël Saint-Pierre, coordonnateur en aménagement et mobilité au Centre d’écologie urbaine de Montréal. Et vous allez voir, c’est passionnant.

Bonne écoute.


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